Sanction
La sanction est l’action prise en cas de violation d’une règle de droit national ou international. La sanction a plusieurs buts : punir le coupable, protéger l’ordre public, et affirmer solennellement que la règle de droit survit à ses violations. L’indemnisation et la réparation du préjudice subi par les victimes sont des mécanismes distincts de celui de la sanction. Le droit international renvoie en général la question de la réparation et l’indemnisation des victimes à la compétence des tribunaux nationaux. Cependant les Cours interaméricaine, européenne et africaine des droits de l’homme et la Cour pénale internationale ont la possibilité d’octroyer des indemnisations aux victimes.
La nature de la sanction
Elle peut varier selon l’entité qui prononce la sanction. Les deux principales sanctions sont pénales et disciplinaires.
Les sanctions pénales
Elles sont prononcées par un tribunal conformément aux règles du procès équitable. Les individus sont passibles de sanctions pénales lorsqu’ils commettent un crime ou un délit défini par la loi. Le droit international et le droit humanitaire fixent les règles du procès équitable et les garanties judiciaires. Des règles particulières du droit humanitaire réglementent l’administration de la justice et des sanctions pénales en période de conflit et dans les territoires sous occupation étrangère.
La sanction doit être prononcée par un tribunal impartial régulièrement constitué dans le contexte d’un conflit armé international (GPI art. 75.4) et au moins par une cour offrant toutes les garanties d’indépendance et d’impartialité dans le contexte d’un conflit armé non international (GI-IV art. 3 commun et GPII art. 6). Ce tribunal ne peut pas sanctionner des faits qui ne constituaient pas un crime ou un délit au moment où ils ont été commis. Il s’agit du principe de non-rétroactivité de la loi pénale. De même, ils ne peuvent pas être punis d’une sanction plus grave que celle qui était prévue par la loi au moment des faits. La sanction doit être individuelle et ne s’appliquer qu’au seul coupable. Les punitions collectives sont interdites.
Les sanctions disciplinaires
Elles sont prises par une autorité contre un de ses subordonnés qui aurait violé un règlement interne.
- La sanction disciplinaire n’est pas toujours entourée des mêmes garanties de procédures que la sanction judiciaire. Pourtant, elle peut avoir des conséquences très graves sur des individus privés de liberté, détenus ou internés en période de conflit comme en période de paix.
- Le droit international humanitaire fixe des règles et des garanties précises, en matière de sanctions disciplinaires en période de conflit, pour les internés, les détenus et les prisonniers de guerre.
L’échelle des peines
Le type et la gravité de la sanction imposée dépendent de l’infraction commise. Elle varie d’un système judiciaire à l’autre. Elle varie aussi selon que les sanctions sont prises contre des individus ou des États.
- Les sanctions prises contre un individu varient selon la gravité de la règle violée :
- la peine de mort, de nombreux pays y ont renoncé ;
- les peines de privation de liberté (elles ne peuvent pas en principe être prononcées pour des questions de dettes) ;
- les amendes ;
- les peines corporelles. Elles sont interdites dans de nombreux pays qui ont adopté le principe de l’ habeas corpus et qui ont axé la répression sur les peines de privation de liberté, mais elles subsistent notamment dans le droit islamique et dans certains systèmes de justice traditionnel. Elles peuvent aussi être employéesen matière disciplinaire. Le droit humanitaire fixe des limites précises pour les peines disciplinaires applicables aux détenus, internés et prisonniers de guerre en période de conflit.
Peine de mort ▸ Peines corporelles ▸ Garanties judiciaires ▸ Détention ▸ Prisonnier de guerre ▸ Internement
- les peines de compensation. Elles sont très répandues dans les systèmes traditionnels et mêlent la punition du coupable et la réparation du préjudice subi par la victime. Il s’agit par exemple du système du « prix du sang » dans lequel la famille du criminel verse à la victime ou à sa famille une somme forfaitaire équivalente au préjudice subi.
Les systèmes traditionnels connaissent également des peines de bannissement d’un individu de la collectivité.
- Les sanctions peuvent être prises contre les États de façon bilatérale ou dans le cadre des mécanismes de sécurité collective. Elles sont alors de nature diplomatique, économique ou militaire.
Consulter aussi
Garanties judiciaires ▸ Sanctions pénales du droit humanitaire ▸ Crime de guerre-Crime contre l’humanité ▸ Peine de mort ▸ Peines corporelles ▸ Peines collectives ▸ Sécurité collective ▸ Sanctions diplomatiques, économiques ou militaires ▸ Tribunaux pénaux internationaux (TPI) ▸ Cour pénale internationale (CPI) ▸ Cour internationale de justice (CIJ) ▸ Réparation-Indemnisation
Jurisprudence
La sanction imposée doit toujours être conforme au principe général de proportionnalité entre la gravité de l’infraction et le degré de responsabilité de son auteur. La détermination de la gravité du crime requiert une appréciation des circonstances particulières de l’espèce, aussi bien que de la forme et du degré de participation de l’accusé dans le crime. La gravité de l’infraction est le premier facteur à prendre en compte pour déterminer une sanction comme le souligne la Chambre d’appel du TPIY dans la décision Celebici du 20 février 2001 (§ 731), la Chambre de première instance du TPIR dans l’affaire Kambanda du 4 septembre 1998 (§ 29), et la Chambre d’appel du TPIY dans la décision Celebici du 20 février 2001 (§ 731).
Dans le jugement Plavsic du 27 février 2003 (§ 52), la Chambre de première instance du TPIY souligne que la gravité des peines est justifiée par : les persécutions de grande ampleur, le nombre de tués, déportés et d’expulsés ; le traitement cruellement inhumain de détenus, et l’ampleur de la destruction de propriété et de constructions religieuses. Dans le jugement Krnojelac du 15 mars 2002 (§ 512), la Chambre de première instance du TPIY souligne que le prolongement de la souffrance émotionnelle, psychologique et physique des victimes est à prendre en compte dans la gravité des peines.
Les juges peuvent également aggraver ou atténuer les peines en fonction de circonstances particulières.
Concernant les circonstances atténuantes , dans les affaires Kayishema et Ruzindana du 21 mai 1999 (§ 19-23) et Kambanda du 4 septembre 1998 (§ 61-62), la Chambre de première instance du TPIR donne les exemples suivants : « une coopération substantielle avec le procureur, la reddition aux autorités compétentes, le plaidoyer de culpabilité et l’expression de remords à l’égard des victimes », et le fait que l’accusé « n’était pas une autorité de jure ». Voir également sur ces points les décisions du TPIR dans les affaires Kambanda du 4 septembre 1998 (§ 61-62), Serushago du 5 février 1999 (§ 31-42), Musema du 27 janvier 2000 (§ 1005-1008). Dans l’affaire Akayesu du 2 septembre 1998, le TPIR relève comme circonstance atténuante le fait que l’accusé n’occupait pas de très hautesfonctions dans la hiérarchie gouvernementale, et que son influence et son pouvoir sur l’issue des événements étaient à la mesure de son rang à l’époque. Dans l’affaire Ruggiu du 1erjuin 2000, (§ 53-80), le TPIR rajoute des circonstances atténuantes supplémentaires telles que : l’absence de passé criminel, la personnalité de l’accusé, l’assistance de l’accusé aux victimes et l’absence de participation personnelle aux tueries.
La question de l’obéissance aux ordres des supérieurs et de la contrainte exercée par les supérieurs peut, dans des limites très strictes, être prise en considération comme circonstance atténuante.
Quant aux circonstances aggravantes , deux éléments majeurs sont essentiellement pris en compte : la position hiérarchique et la participation active et directe aux faits criminels. Dans l’arrêt Kambanda rendu le 4 septembre 1998 (§ 61-62), la Chambre de première instance du TPIR souligne que le fait pour l’accusé d’avoir occupé à l’époque où il commettait lesdits crimes les plus hautes fonctions ministérielles est de nature à définitivement exclure toute possibilité d’atténuation de la peine. De même, pour l’accusé Rutaganda, celui-ci a abusé de sa position d’autorité, a joué un rôle important de meneur dans l’exécution des crimes, éléments soulignés par la Chambre de première instance du TPIR le 6 décembre 1998 (§ 468-470) et encore le 27 janvier 2000 dans l’affaire Musema (§ 1000-1004). Cette position est également défendue par la Chambre de première instance du TPIY, dans les affaires : Plavsic du 27 février 2003 (§ 57), Simic du 17 octobre 2002 (§ 67), Sikirica et al. du 13 novembre 2001 (§ 138-139 et172), Krstic du 2 août 2001 (§ 709), Foca du 22 février 2001 (§ 863), Blaskic du 3 mars 2000 (§ 788). Dans l’affaire Blaskic du 3 mars 2000, la Chambre de première instance du TPIY explique que la participation directe et active au crime signifie que l’accusé a commis de ses propres mains tous ou quelques crimes dont il est accusé (§ 790-791). Dans l’affaire Musema du 27 janvier 2000, la Chambre de première instance du TPIR considère que le fait pour l’accusé d’avoir été armé d’un fusil dont il a fait usage au cours des attaques prouve une participation active et directe constituant une circonstance aggravante (§ 1001-1004). Cette position est confirmée par la Chambre de première instance du TPIY dans sa décision du 21 février 2003 dans l’affaire Ntakirutimana (§ 884).
Responsabilité ▸ Sanctions diplomatiques, économiques ou militaires ▸ Sanctions pénales du droit humanitaire